Mad, de Daphné du Maurier (1972)

Je poursuis ma découverte de l’oeuvre de Daphné du Maurier, lue pour la première fois en janvier, avec l’Auberge de la Jamaïque qui m’avait fait voyager sur les côtes anglaises, dans le monde de la piraterie du XIXè siècle.

Avec « Mad », nous sommes toujours en Cornouailles, mais au XXIème siècle. Alors qe l’auteure l’a écrit au tout début des années 1970. Surprenant ! Il s’agit en fait d’une dystopie, dont l’action se déroule 30 ans plus tard, vers l’an 2000.

Ce roman d’anticipation qui nous projète dans une Angleterre qui vient de se séparer de la communauté européenne (quelle visionnaire !), et qui vient de créer une fédération avec les États-Unis. Les Etats-Unis ont absorbé l’Angleterre, quoi.

Les américains débarquent donc en Angleterre et imposent bien des changements aux anglais. Ceux-ci sont plutôt satisfaits car ils voient dans cette union un moyen de se redresser économiquement, la crise économique et sociale étant terrible.  Mais certains se révoltent contre cette tutelle, et des privations de liberté vont être imposées face à ces petits mouvements de contestation qui se développent.

Mad, 80 ans, célèbre comédienne à la retraite, vit à la campagne avec sa petite-fille de 19 ans, Emma, et les 6 jeunes garçons qu’elle a adoptés. Elle s’est retirée de la vie artistique tumultueuse de Londres et adore son petit cottage campagnard et cette vie simple. Il y a aussi Dottie, son ancienne maquilleuse-habilleuse devenue intendante de cette maisonnée agitée par les 6 enfants de Mad.

Très fantasque, Mad élève ses garçons sans leur fixer de limites, ce qui inquiète pas mal Emma, qui reste auprès de sa grand-mère pour essayer de la canaliser, alors qu’elle rêve d’aller vivre sa propre vie.

Le jour où un régiment d’américains venu contrôler la côte réquisitionne la grange de Mad, la vie de cette famille originale va se trouver bouleversée. Chaque journée apportera son lot d’aventures. Au grand désespoir d’Emma, qui n’est pas  insensible au charme d’un officier américain, sa grand-mère va se lancer dans la résistance.

C’est un roman que j’avais trouvé par hasard, d’occasion dans une bouquinerie. Je n’en connaissais rien, je n’avais jamais entendu parler de ce titre de Daphné du Maurier. Je ne m’attendais pas à lire une dystopie et ce texte très inattendu m’a bien plu malgré la petite romance qui s’y trouve. Il y a beaucoup de revirements et drames, de suspens, d’humour, aussi. Écrit dans les années 70, l’écriture n’est pourtant pas du tout vieillotte, très dynamique, entraînante. C’était vraiment rigolo d’apprendre comment l’auteure imaginait qu’on vivrait en l’an 2000.

Enfin et surtout, c’est extrêmement troublant et intéressant de se rendre compte que l’auteure avait pu imaginer un brexit, ce dans les années 70, alors que l’Angleterre n’était même pas encore entrée dans la CEE. J’imagine que l’auteure a songé à cette histoire, inspirée par les infos de l’époque qui devaient beaucoup parler des négociations pour entrer dans l’Europe.

Malgré quelques longueurs, j’ai aimé ce roman très surprenant, original, à la fois désuet et très comtemporain par les thèmes abordés : la gestion politique des crises économiques, la liberté de contestation, la colonisation.

Un roman d’anticipation vintage qui montre pleinement toute la richesse des réflexions et d’imagination de Daphné du Maurier. J’ai beaucoup aimé.